Déja le titre est savoureux, d’ailleurs j’ai dévoré ce bouquin bourré de références, d’humour, et de lucidité, il m'a laissée énergique et déterminée ! Isabelle Germain est journaliste et co-présidente de l’Association des femmes journalistes. Elle balaie (c'est très poussiéreux !)... les sphères des différents pouvoir : politique, économique, intellectuel, médiatique et enfin ... domestique ...
Elle met le doigt sur ces chiffres qui font mal (aux femmes), sur nos conditions d’existence et d’exercice du pouvoir (pour le peu de femmes qui y parviennent, malgré tout).
Elle pointe le goulot d’étranglement médiatique qui filtre absolument toute la hiérarchie de l’information, fausse l’image des femmes réelles, et aborde tous les sujets sous un angle stéréotypé où les femmes, et même les hommes d’aujourd’hui, ne se reconnaissent pas, ou plus.
Et c’est là toute la force du livre que de dire ce que nous pressentons : nos attentes ne sont pas forcément si différentes, hommes et femmes ... en revanche un fossé se creuse de plus en plus entre la population ... et les élites auto-proclamées, machistes et archaïques, de plus en plus décalées de la réalité du terrain.
Une autre particularité très positive du livre est de nous informer de l'existence de forums et réseaux de femmes, pour faire partager leur expérience des lieux et situations de pouvoir, leur analyse. Il s’agit de réaliser la parité mais aussi que les femmes ne se dissolvent pas dans le machisme ordinaire, que les sujets sociaux, qui nous sont jusque-là dévolus, de manière gratuite ou précaire ... deviennent des sujets d’importance à la hauteur de l’enjeu : c’est à dire notre avenir !
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Voici quelques extraits du livre :
• “Seulement voilà, les tenants des théories machistes disposent du pouvoir suprême : celui de prendre la parole dans les médias. Ce sont de ‘bons clients’, ils attirent l'audience. Mais surtout, ils ‘font autorité’. Ces hérauts de la cause du mâle dominant ne sont pas d'inoffensifs nostalgiques. Ils réactivent des croyances qui sont autant d'entraves à la conquête du pouvoir par les femmes. Médecins connus, ils représentent une vérité scientifique que le commun des mortels a du mal à remettre en question...”
• “Le Women's Forum for Economy and Society, le ‘Davos des femmes’, créé en 2004 par Aude de Thuin a tout de suite été un succès. Il propose aux femmes une tribune pour exprimer ce qu'elles ont à dire au monde. Il n'existerait pas si la société était aussi féminisée que leprétendent les détracteurs du féminisme. Contrairement à ce qu'ils craignent, elles ne réclament pas le pouvoir dans sa totalité, mais un meilleur partage.”
• "Les exemples d’absence de considération pour la moitié féminine de la population dans les politiques publiques sont légion. Lorsque les femmes du PS notamment affirment que la politique du ‘travailler plus pour gagner plus’ est une régression pour l’égalité hommes/femmes parce que les femmes ne peuvent en bénéficier en raison des responsabilités familiales qui pèsent sur leurs épaules, elles sont quasiment inaudibles. Ce n’est pas sur ce thème-là que l’opposition combat l’idée sarkozienne."
• "Un homme est considéré comme compétent jusqu’à ce qu’il ait apporté la preuve de son incompétence. Une femme est considérée comme incompétente jusqu’à ce qu’elle ait apporté la preuve de sa compétence. C’est une phrase qui est revenue très souvent dans la bouche des intervenants lors du Women’s forum de 2006."
• "Dans tous les journaux, une femme ouvrier est appelée une ouvrière, une femme chômeur une chômeuse, mais dès qu’il y a prestige le masculin l’emporte. La féminité n’est pas la bienvenue. Ce mépris symbolique précède le mépris tout court. Peu de femmes bataillent sur ce principe. Il y a tant à faire par ailleurs... "
• "La disproportion est énorme entre le handicap que représente la maternité pour les entreprises et les sanctions que cette maternité inflige aux carrières des femmes."
• "Dans certaines entreprises les réseaux de femmes ont réussi à obtenir la création de commissions chargées de s’assurer avant chaque nomination, que la totalité des candidatures potentielles soient prises en compte. (...) Ces dispositifs sont fragiles. Si personne ne vérifie leur existence, ils disparaissent."
• "Imaginons qu’en l’an 3000 des historiens essaient de comprendre le fonctionnement de la société du début du 21e siècle à travers les médias. Ils conclueraient que les hommes sont 5 fois plus nombreux que les femmes et que ces femmes ont une fonction décorative, reproductrice et domestique."
• "Alors que cette idée n’a jamais été prouvée ... pourquoi affirmer que ‘l’emploi maternel’ a des ‘effets négatifs’ dans un rapport qui a pour but d’anticiper une loi sur le droit opposable à la garde d’enfants ?"
• "Liberté d'expression... de qui ?"
>>> Retrouvez l’auteure sur le site du webzine www.LESNOUVELLESnews.fr dont elle est la créatrice et sur le blog www.durosedanslegris.fr dont elle est l’animatrice.
>> Elle sera en conférences signatures : à Perpignan le 10 mars et à Brest bientôt, le 14 mars au salon du livre à Paris... et dans toutes les bonnes librairies qui l'accueilleront pour des rencontres ;o)
“Si elles avaient le pouvoir” d’Isabelle Germain, éd. Larousse (2008), 125 pages - 9,90 euros.