jeudi 28 août 2008

à propos de textes sur l’intersexualité ...



Ma première lecture de vacances a été un numéro spécial «féminisme et luttes intersexes» titré «à qui appartiennnent nos corps ?» des Nouvelles Questions Féministes n° 27-1 (prix : env. 19 euros).

L’intersexualité est un sujet que je ne connais pas du tout. Le livre «c’est pour un garçon ou pour une fille» de G.-C. Guilbert m’avait laissé entrevoir que la différence des sexes ne se limite pas à 2 options «tout masculin» ou «tout féminin» mais qu’entre les 2 il existe une infinité de nuances ...

J’ai finalement lu plusieurs textes et témoignages. Celui de Camille Lamarre m’a particulièrement touchée peut-être parce qu’on est de la même génération. Ce qu’il a ressenti affectivement, physiquement, a fait écho (en moi) au désarroi de l’enfant en face d’adultes tout puissants : parents, médecins, et de toute la société préfigurée par les réactions des autres enfants.

Le machisme dans la médecine se traduit là par des actes effarants que je n’aurais pas imaginé en France, si récemment, mutilations et examens douloureux : la partie masculine de son sexe ayant été «rectifiée» dans sa toute petite enfance, sans avis ni préparation psychologique particulière ...

«par la suite, les médecins avaient recommandé à mes parents d’effectuer des dilatations vaginales régulières pour éviter la fermeture de cette «chose» créée de toutes pièces, ce qui ne manquerait pas d’arriver si on ne faisait rien car l’orifice extérieur était particulièrement étroit. Pendant des années, ma mère allait donc devoir, stoïquement, armée d’une «bougie» métallique, procéder à des dilatations douloureuses et surréalistes sur sa fille, dans ma chambre, dans le secret et en essayant de faire en sorte que le reste de la fratrie n’en sache rien».

Camille Lamarre explique tout son cheminement, il a finalement appris que ses chromosomes étaient XY donc masculins. Il vit mieux ou bien maintenant et l’article se termine sur des mots pleins d’humanité, et d’amour pour sa compagne. Mais comment s’en remettre ?!!!

Désolée pour les extraits difficiles ! J'espère faire surgir quelque chose : l’extrémité de l’iceberg. Et qu'on se demande : mais comment peut-on en arriver là ? Ben avec des phrases comme "c'est pour les garçons" ou "c'est pour les filles" aussi hermétiques qu'il est possible, le jouet garçon, le jouet fille par exemple ... et gare à ne pas se tromper dès le premier doudou ...


Le sacro saint «pipi debout» qui fait la petite fierté des parents, c’est un signe peut-être risible de ces différences qu’il faut à tout prix marquer, exhiber, exagérer, valoriser ... et si cela peut prêter à sourire voilà ce qu’écrit un des auteurs, Vincent Guillot :

«Nos organes génitaux extérieurs ne sont pas toujours aptes au coït considéré comme classique par les médecins, c’est à dire la pénétration vaginale. La plupart du temps il le sont et dans ce cas ils ne seront pas mutilés. Mais il est pour le moins étonnant que, si les médecins décident de les modifier, les seuls critères retenus pour l’assignation sont la capacité à effectuer un coït hétérosexuel et à uriner debout. C’est un hypothétique pari sur l’avenir car aucune étude scientifique n’a pu établir un pronostic fiable quant au genre dans lequel l’enfant se vivra plus tard. Au contraire ces études montrent un taux d’erreur de diagnostic important ou plus grave encore une incapacité chronique des médecins à suivre sur le long terme les enfants assignés pour constater la réussite ou l’échec des modifications morphologiques... Or il n’y a pas que dans ce type de sexualité (coït hétérosexuel) que l’on peut s’épanouir, et plus encore, bon nombre de personnes ne sont pas en demande de ce type de rapports y compris chez des personnes qui ont la capacité à l’exécuter...»

Ça fait écho à mon féminisme, au sentiment d’étrangeté de toujours devant ces “masculin” et “féminin” aussi arbitraires qu’obligatoires : “tu es une fille / un garçon, donc voilà comment bien te comporter, jouer, parler, aimer, vivre, travailler...” toutes ces gamelles et leurs lots de privilèges surtout masculins ! et de discriminations subies essentiellement par des femmes ! En tous cas je recommande la lecture de ces Nouvelles Questions Féministes pour voir de nos yeux jusqu'où ces barrières mènent !